Le soleil est déjà levé depuis longtemps sur Flamingo Rd. lorsque Sam Farha se lève enfin du siège en skaï beige qui accueille tous les joueurs de l’Amazon Room. Le joueur d’origine libanaise est fourbu, mais heureux. A 7h du matin, il vient enfin de décrocher un troisième bracelet WSOP avec lequel il a depuis trop longtemps flirté, sans jamais conclure. Son adversaire anglais, James Dempsey, n’est même pas vraiment déçu : cela fait plus de quatre heures que dure le heads-up de ce Omaha Hi-Lo 8-or-better à 10 000$ (l’épreuve reine de la variante), et autant de temps qu’il ferraille, sans lâcher un coup, avec Farha.
Si ce dernier a commencé le duel final avec un avantage de 15 contre 1, sa pression successive sur l’Anglais (et son parterre de supporters avinés) n’a pas réussi à amener le coup de grâce : au bout de quelques double-up, à 3h du matin, Dempsey était de retour, bien décidé à ne rien lâcher.
Car pour Farha, pas de deal possible, c’est une question d’honneur. Plus que d’argent, en tout cas, puisque Farha est un habitué des plus grosses tables de cash-game de Las Vegas, et un gambler devant l’éternel aux tables de Blackjack spécialement montées pour lui au Bellagio, section (Very) « High Limit ».
Sam Farha est une exception dans le monde du poker contemporain, une survivance d’un certain passé, glorieux, du monde du « gambler ». Si ses ancêtres, Puggy Pearson ou Amarillo Slim en tête, affirmaient être prêts à affronter n’importe quel adversaire à n’importe quel prix (Pearson l’avait même fait inscrire sur son « Roving Gambler » bus, qui lui permettait d’écumer les campagnes américaines à la recherche du pigeon à plumer), Sam Farha personnifie plus que tout autre la flambe old school, un mélange incertain de charisme incroyable, d’élégance flashy et de détachement presque total à l’argent.
Ce matin, à l’aube, Farha venait surtout prouver que, malgré ses upswings et downswings monumentaux en cash-game, il était plus que jamais un adversaire redoutable. Un spécialiste du Big Game et de ses variantes multiples qui a pourtant, un jour de mai 2003, été tout prêt du Graal du poker, le titre de champion du monde WSOP.
Ce jour là, si le runner-up s’appelait Sam Farha et affichait un sourire étincelant, une chemise en soie largement échancrée et une chaîne en or massif, le vainqueur était un petit comptable bonhomme, en short, sandale et t-shirt, au bouc mal taillé et au regard fuyant, Chris Moneymaker. C’est ce « guy next door » qui a changé la face du poker moderne, incarnant le rêve à portée de main, et déclenchant le boom du poker en ligne, une des bulles spéculatives les plus folles de ces dernières années.
Que ce serait-il passé si Farha avait eu raison de cet amateur qualifié pour quelques dollars ? Le monde du poker serait-il toujours le même, attirant des fields de quelques centaines de joueurs à peine pour les tournois les plus populaires ? Aurait-il encore plus souffert de son image glamour mais tendancieuse, serait-il resté dans les limbes des différentes juridictions nationales ?
Si « l’effet Moneymaker » a été sans aucun doute un énorme bol d’air pour le monde du poker, il a aussi incarné, par la chute finale de Farha, un passage de témoin, le symbôle d’un changement d’époque que certains peuvent parfois regretter.
Le charme cossu des « gaming clubs » a très souvent fait place à une sorte de kermesse géante ; les costumes bien coupés ont vite disparu au milieu des tenues de campeurs du dimanche ; les tournois « skilled », où le meilleur est censé gagner, sont pour certains devenus des « crapshoots » où le nombre de coinflips à remporter pour finir ITM frise l’absurdité.
Finalement, depuis ce 19 mai 2003, le poker vit dans un état de douce schizophrénie qui anime, plus que toute autre compétition, les World Series Of Poker : les épreuves « grand public » d’un côté, à faible buy-in, en No Limit Hold’Em ; les fields plus restreints, plus coûteux (5 000$ et plus) et à variantes old-school (Stud, Lowball), gambling (PLO) ou complètes (HORSE, 8-game) pour les icônes du poker ou les riches hommes d’affaires.
Et si beaucoup prétendaient qu’il courait depuis 7 ans après cette grande victoire jamais décrochée, Farha les a démenti une fois de plus. Son poker n’est finalement pas de leur monde. Il appartient à tout jamais au panthéon des high-rollers qui donnent leur âme, leur identité et leurs lettres majuscules à l’univers du jeu.
Le heads-up aura finalement été assez rapide malgré un retour de suspens dans un match qu’on pensait à sens unique après le KO de Sofian dès le début de la finale.
Didier Logghe se sera bien battu mais s’incline au final avec Valet Sept contre la paire de Huit à l’issue d’un board : 6 7 K 2 4
Belle victoire pour Sofian, qui empoche un chèque de 35230€, tandis que Didier repart avec un gain de 23350€.
Place désormais au champagne et à la photo officielle pour célébrer le vainqueur du BPT Toulouse 2018.
Assis devant une tonne, Sofian remporte le trophée du BPT Toulouse 2018, en costaud !
Niveau 33 – 150k/300k ante 25k – 2 joueurs – Moyenne : 10425k
Le heads-up commence très fort par un double-up de Sofian, qui arrive à doubler avec As Six contre les Dames, une nouvelle fois, chez Didier. Le 6 au flop puis l’As turn et Didier doit se délester de 9025k, le montant du tapis adverse. Pour la plus grande joie du clan de Sofian, resté en nombre malgré l’heure tardive.
Puis Didier relance la machine et enchaîne deux double ups de suite pour revenir à niveau !
Ce heads-up commence très fort, en mode montagne russe.
Le champagne va réchauffer si les deux finalistes ne se décident pas !
Niveau 33 – 150k/300k ante 25k – 3 joueurs – Moyenne 6950k
Enorme coup entre Didier Logghe et Ludovic Soleau, le premier allant sortir le second en deux coups de suite.
Le coup principal, celui qui déstacke Soleau et le laisse avec une toute petite blind, se déroule d’une façon bien étrange. Fatigue ou méconnaissance des règles, Didier de petite blind, annonce « relance » en poussant la mise initiale qu’avait posé Ludovic au bouton, soit un min-raise. Sofian en BB s’échappe du coup et après intervention rapide et efficace du floor, on n’autorise à Didier qu’une min relance, ce que s’empresse de compléter Ludovic.
Flop QJ4. All-in de Ludovic et insta call de Logghe, avec QQ pour brelan max floppé. Ludovic retourne les As, meurtris, et rien ne vient l’aider. Après avoir payé les 4420k du tapis adverse, il ne lui reste que 450k, soit à peine une BB, qu’il perdra le coup suivant contre le même adversaire.
Ludovic Soleau sort donc à la troisième place, pour un joli gain de 15720€ !