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Le journal Off du poker

[Journal off des WSOP #1] La saison des tauliers

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Pour les amateurs de poker, le rêve éveillé de se qualifier au Main Event (10 000$ à l’entrée, et l’un des plus larges fields de l’année à la clé) commence début juillet, chaque année. Pour les pros, le marathon ne dure pas les deux semaines du Main Event (quand tout se passe parfaitement) mais trois fois plus longtemps : dès le 30 mai, toute l’intelligentsia du poker prend ses valises pour les poser à Las Vegas. Avec en ligne de mire la volonté de perfer au mieux, de ne pas se laisse embarquer par le rythme infernal des deux tournois quotidiens et ne pas ressortie la bankroll exsangue de ce très long mois de pré-compétition. Des fortunes se font au gré de la cinquantaine de tournois qui amènent au Main Event, et des destinées se perdent bien plus facilement sur cette route.

Mais les phases préliminaires sont surtout l’occasion pour l’élite du poker de se retrouver, concentrés, autour de tournois spécifiques (variantes, buy-in élevés) aux fields plus restreints. On y joue en famille, tout le monde ou presque a une raison pour avoir dépensé 25 000$ dans un Mixed-Max (premier grand Event de la série) ou 10 000$ sur un 2-7 Triple Draw qui célèbre la variante la plus prisée depuis quelques mois des high-stakes nosebleed du web. A ce jeu là, d’ailleurs, les Français y ont leurs habitudes : que ce soit l’éternel revenant David Benyamine ou la terreur du online, Alexandre « AlexMoon » Luneau. Parmi ce field de stars américaines (regardez les places payées des premiers Events, on y croise quasiment 100% de joueurs américains, comme lors du Mixed-Max à 2( 000$), les deux Français ont ainsi réussi à se glisser parmi les « tauliers » de l’été : douzième pour Benyamine (pour 25 000$) et huitième pour Luneau (39 000$). Magie du fisc, le premier est déclaré résident américain, dans le Nevada, tandis que le second habite Londres (même s’il passe le plus clair de son temps à Macau).

Benyamine, éternel spectre du poker hexagonal, génie maudit jamais brûlé. On l’a croisé quelques temps, l’année dernière, dans la grosse partie d’un cercle parisien, avant de disparaître aussi vite qu’il n’était revenu. Les histoires les plus folles, comme toujours, courent à son propos. Hustler, Benyamine ? Surement, à la manière des grands champions de l’histoire du poker, toujours un jeu de cartes en poche, à proposer des parties de poker chinois dans les grandes suites des hôtels qui jouxtent les casinos. Au vu des sommes perdues, certains ont commencé à douter de la « propreté » du jeu de cartes en question. Et quand les interrogations se font plus vives dans une telle partie privée, mieux vaut prendre le large : le goudron et les plumes, ca n’est pas encore totalement disparu.

David Benyamine est en tout cas le premier des Français sur place, ouvrant la voie à la seconde vague d’un contingent français qui va s’enrichir, dès la première quinzaine de juin d’autres grands noms qui savent que vivre 45 jours dans l’air sec et climatisé des gigantesques salle du Rio relève de la gageure. Bien malin celui qui pense dompter une ville qui compte plus de cadavres que de renaissances, qui aime à trahir celui qui en vénère l’énergie et le strass, qui n’hésite pas à frapper durement ceux qui auront oublié ne serait-ce qu’un instant la violence de la nature humaine, l’appât au gain, la fièvre du jeu, les tours de passe de passe des amies d’un soir.

Alors on s’isole, dans le cadre presque réconfortant des salles du Rio. Amazon, Brasilia, comme autant de destinations exotiques au décor borgne : une moquette tachée par les milliers de joueurs quotidiens, un froid polaire au petit matin (14 degrés au bas mot) et un chemin itératif, comme pour créer une routine qui rassure. En ce début du mois de juin, on va aux WSOP comme on va « taffer » : à l’heure, ou presque, parés pour la bataille, le repas de midi soigneusement préparé dans un Tupperware, des barres de vitamines dans les poches. On y croise ses collègues de boulot, autour d’une pause pipi express ou d’un diet-soda quelconque toutes les deux heures. On peste contre les nouveaux arrivants, ces péons des évènements du week-end (près de 8000, au 1er juin, pour le Millionaire Maker à 1 000$ de buy-in) qui ne comprennent rien à rien, mais on s’inscrit tout de même à leurs tournois à la dead-money effarante. Car les tauliers sont partout, aux grands fields de midi comme à ceux, plus chers, de 17h, motivés par les side-bets d’arrière-salle qu’ils multiplient. Et difficile de les dévier de leur course au bracelet, à la table finale, à l’ITM. En cinq events seulement, c’est tout le gotha du poker américain qui a pris le pouvoir, comme chaque année : Vanessa Selbst, d’abord, avec le bracelet du prestigieux Mixed Max à 25 000$, dans une table finale où JC Tran et Matt Giannetti ; Tuan Le dans le 2-7 Triple Draw, juste devant Justin Bonomo, Eli Elezra, Nick Schulman et Phil Galfond ou encore Doyle Brunson ; à la table finale du Seven-Card Razz qui a lieu ce dimanche 1er juin, c’est Brock Parker, Ted Forrest, Brandon Cantu et David Bach qui sont encore sur la route d’un certain Phil Hellmuth, en quête de son… quatorzième bracelet.

Jérôme Schmidt

(crédits photos : WSOP.com)

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[Finale WiPT] L’union fait la force

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Il faut croire que la devise ne sied pas qu’aux pays qui l’ont officiellement adoptée (Andorre, Angola, Belgique, Bolivie, Bulgari, Géorgie, Haïti et Malaisie) : au poker aussi, l’union fait la force. C’est en tout cas l’évidence qui s’impose lorsqu’hier, au lancement des derniers Day 1, trois figures du poker hexagonal sont montées sur scène, scellant ainsi une alliance que beaucoup n’auraient jamais imaginée il y a encore quelques années : Matthieu Duran (Live Event directeur de Winamax), Patrick Partouche (des casinos du même nom) et Apo Chantzis (Texapoker).

Alors que des secousses avaient mis de la friture sur la ligne de la relation Winamax-Partouche il y a plusieurs années, il fallait bien tout le savoir-faire et le talent naturel d’Apo Chantzis, fort de ses équipes et son maillage extraordinaire sur tout le territoire, pour mettre tout le monde autour d’une même table, et arriver à sceller un destin commun. Hier, leur présence à trois sur la grande estrade du Pasino Grand d’Aix-en-Provence était à la fois le symbole d’une industrie pacifiée, qui travaille désormais main dans la main, et d’une victoire médiatique, devant ce qui allait devenir le plus grand field d’une finale du Winamax Poker Tour.

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[Finale WiPT — Journal Off] Moi y’en a vouloir des sous

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Petit à petit, le field se rapproche « de l’argent ». Une obsession pour ces milliers de joueuses et joueurs qui se déplacent parfois depuis l’autre bout de la France afin de s’offrir un shot au prizepool juteux proposé par ce tournoi à seulement 500€ ? Pas certain, ou en tout cas, pas obligatoirement pour tout le monde. L’obsessions d’entrer dans l’argent (souvent pour un gain marginal, à moins d’atteindre le Top 20 du tournoi, surtout lorsqu’on a mis plusieurs bullets dans le tournoi, jusqu’à sept pour les plus opiniâtres) relève plus du défi personnel —inscrire sa première ou son énième ligne HendonMob, raconter à ses amis son run avant son badbeat qui met une halte définitive à tout rêve d’argent et de gloire— que d’un plan de carrière. Les pros, on le sait, sont de moins en moins présents dans les fields de poker, ce jeu de hasard et de talent (dans l’ordre inversé) étant devenu pour beaucoup un loisir, une récréation, une parenthèse qu’il faut garder enchantée.

Rien de plus frustrant pour un joueur, en effet, que de ne pouvoir jouer ; au piquet, pour celui qui s’interdit de jeu comme pour celui qui y est tricard du boléro. En montant le long escalator qui amène au premier étage du Pasino Grand d’Aix-en-Provence, on glisse lentement, dans le brouhaha des jetons et des files de joueurs en attente d’un siège, au beau milieu des fanions qui ornent les murs, célébrant vainqueurs et héros du Winamax Poker Tour au fil des années. Parmi les visages en gros plan, cadrés serrés, une seule photo de groupe : celle de la « Team Big Roger », victorieuse en 2013 du seul tournoi par équipe proposé lors de ces festivals. Sur l’affiche, trois visages souriants, ceux de Stéphane Bazin (depuis très rare sur le circuit poker), Antonin Teisseire (omniprésent lors des tournois du sud-est de la France et sur le circuit Partouche) et Roger « Big » Hairabedian. Ce dernier, nous en avons déjà parlé in extenso lors d’une plongée tête la première dans son éternelle télé-(ir)réalité qu’il autoproduit chaque jour ses réseaux sociaux, annonce son éternel come-back. Mais ses courbes émotionnelles, tout aussi ascendantes que descendantes, ont rendu l’opération de plus en plus délicate. Chaque espoir s’ouvre teinté d’une seule crainte pour l’observateur empathique : que rien ne voie le jour, que tout s’effondre avant d’avoir été monté, voire simplement esquissé.

On ne croisera pas Roger Hairabedian à Aix-en-Provence au WiPT 2025. Contempteur du online, ce n’est pas pour cette raison qu’il aura décidé de skip un large field comme il les aime ; il est tout bêtement interdit de tous les casinos Partouche. L’homme a du talent —il en a toujours eu et, peu importe les années qui passent, il sait signer quelques places dans les casinos qui l’accueillent encore, comme le Circus à Paris— mais aussi celui de se mettre à dos la terre entière, avec quelques obsessions à la clé en sus. On ne sait jamais vraiment, dans les nébuleux rebondissements qui peuplent ses dérives intimes, quelles sont les véritables raisons de ces interdictions de casino, fâcheries diverses et vendetta en ligne. Peut-être, finalement, n’est-ce d’ailleurs pas la question principale…

« Les centaines de choses que l’on a faites de travers dans la vie. Pas forcément à dessein : elles ont pu se produire par stupidité, maladresse, inconscience, par mégarde, pure connerie, sans arrière-pensée« , lisait-on justement à quelques minutes du coup d’envoi du Day 1E en incipit d’un roman sublime, Jours blancs (Jeroen Brouwers, 2013), sous le regard étincelant du Big Roger gagnant d’il y a une décennie. Le regard, depuis, s’est fait plus dur —parfois lucide, parfois désespéré, souvent encore joueur. « Il arrive qu’un souvenir insupportable s’en échappe, et pénètre soudain votre cerveau, pareil à un cambrioleur qui vous jette une corde à piano autour du cour, et nous serre la gorge. » Le souvenir de la victoire, de la gloire et de l’argent étrange ainsi au quotidien ceux qui ont connu de telles cimes ; la respiration de ce millier d’anonymes qui se presse sur l’escalator menant à la table de tournoi n »est que régularité et stress positif.

Que faire, lorsqu’on ne peut plus jouer ? Lorsqu’on vit à distance les grands évènements sans, parfois, ne pouvoir y participer ? A l’époque de champions sublimes comme Stu Ungar, c’était la brokitude qui interdisait toute action. Dans sa biographie, écrite par Nolan Dalla (Joueur né, 2008), l’ancien champion du monde tourne en rond, imaginant les caves s’envoyer en l’air pendant que lui rumine dans sa chambre d’hôtel miteuse du Gold Coast, à Las Vegas. En 2025, Roger Hairabedian a inventé d’autres expédients, intronisant à quelques semaines des grandes compétitions de l’année (WiPT, WSOPC, WSOP Vegas) une joueuse inconnue, Céline « Douceur » Beauchamp, 716$ au compteur de sa page HendonMob. Aux antipodes, donc, de Roger Hairabedian, 11ème joueur all time français et ses quelques 5 500 000$ de gain. On imagine, assez simplement, un contral moral de stacking avec celle qu’il estime « prête à faire de grandes choses dans le poker », sans en connaître plus de détails.

A la hargne et la grinta du parrain Hairabedian, succèderait donc la « douceur » de sa néo-protégée, Céline Beauchamp, qui a cette double tâche muette d’adoucir l’image du mentor et d’aller chercher la gagne là où les portes lui sont désormais fermées. Croisée par hasard à table lors du Day 1C de la finale du WiPT, on ne lui aura pas porté chance, puisqu’elle va sauter quelques secondes plus tard du tournoi principal. Si l’argent et la gloire médiatique sont au choix les deux mamelles qui sous-tendent le monde depuis l’époque pas si révolue de Jean Yanne (pour les plus jeunes, réalisateur & acteur anar-libertarien des années soixante), vivre par procuration le jeu, ses frissons et ses enjeux narcissiques, semble relever d’un lent supplice qu’on ne saurait conseiller à ses pires ennemis. Comment continuer à être, lorsqu’on a été ? Parmi la foule qui s’amasse au fur et à mesure que nous écrivons ces lignes, il y a sûrement dans cet horizon de rêves flottants au-dessus de chaque siège bien des nuances de fantasmes : l’action, le fun, la légende, la victoire et même la perte. Rien ne va plus, faites vos jeux.

(photo : Jules Pochy)

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[WPO Bratislava – journal off] L’odeur du tabac froid

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Il n’y a pas que la victoire dans la vie. Pas que le rush d’adrénaline de la river miraculeuse, la douce euphorie des triomphes annoncés que rien ne vient trahir. Pas que les billets qui passent de main en main pour finir dans sa poche, pas que les trophées à empiler, les credit-card roulettes jamais perdues, les regards empreints d’admiration, les amitiés nouvelles et éphémères. Il y a la défaite, aussi. La solitude d’un casino à 8h du matin, en pleine semaine, quand les petits-déjeuners offerts par l’établissement sont autant d’incitation à rester encore un peu, histoire de se refaire, de ne pas affronter le ciel grisâtre qui a englouti la ville, ne pas croiser son regard dans les miroirs fumés des couloirs qui amènent vers la sortie.

En arrivant trop tôt ce matin au casino Bratislava, la ferveur de 23h59 s’est éclipsée depuis quelques heures. Les vainqueurs, eux, dorment du sommeil de ceux qui ont vu juste. Ne restent que les joueurs, les vrais joueur, ceux qui se fichent bien de gagner et de décaver. Le parfum capiteux qui flotte dans les casinos et les clubs de jeux du monde entier (une amie, ancienne responsable d’un cercle de jeu parisien, m’avait un jour confié que cette odeur si typique aux établissements de jeux, constituait pour elle une madeleine de Proust olfactive, comme l’odeur du poulet dominical, qui la réconfortait immédiatement, par habitude) a depuis longtemps été dissipé par l’odeur du tabac froid. Au sous-sol, machines à sous sous la forme modernes, roulettes électroniques ou avec  croupier et tables de blackjack accueillent une dizaine d’irréductibles. Des joueurs locaux, habitués de ces wee hours où l’on joue par habitude, manque d’envie, voire lassitude. C’est l’illustration presque plastique de la grande théorie psychanalytique du joueur pathologique : il préfère perdre, afin d’avoir une raison de se plaindre —et donc d’être écouté, réconforté, materné.

La gagne, la ouinne, n’est pourtant pas interdite. Au hasard d’un billet de 50 € transformé en quelques minutes en plusieurs billets verts, on se découvre repartir les poches pleines, laissant derrière nous, très vite, le tabac froid, les mines grises, les cafés tièdes du buffet, les roulettes qui tournent dans le vide. A l’étage, les tournois de poker n’ont pas encore repris. Il faudra attendre midi, et l’arrivée d’une flopée de WIP (icônes télévisuelles, influenceurs, sportifs, etc.) ainsi que de joueurs pros pour que la fête reprenne et puisse battre son plein. Et là, peu importe la gagne tant qu’il y a le fun.

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