Portraits / Interviews
Alexis Laipsker, le thriller dans les veines
Published
5 ans agoon
Figure multifacette du poker hexagonal, bien connu pour sa désormais fameuse Maison du bluff et autres téléréalités poker qui ont aidé à populariser le jeu au-delà d’un cercle d’initiés ou d’amateurs éclairés façon WPT, Alexis Laipsker avait disparu de la planète poker quelques mois (il fut la figure publique de PokerStars pendant des années), pour réapparaître récemment en directeur du Club Montmartre appartenant à Mme Ruggieri. L’homme porte toujours beau, a la repartie cinglante et aimable, et aime passionnément le poker, qu’il continue à défendre, côté live, avec les cash-games et les tournois à venir du club.
Mais lors de ce hiatus, Alexis Laipsker a ravivé l’une de ses passions d’adolescence, l’écriture. Lui qui a été journaliste – il a dirigé feu Poker VIP, notamment – n’a pas mis bien longtemps à se lancer tête la première dans l’écriture d’un roman, sans autre filet que le peu de temps qu’il s’était imparti. Pas de contact dans le milieu de l’édition et pas de plan d’écriture ? Pas grave ! C’est en forgeant qu’on devient forgeron… Au résultat, son premier roman, policier, sort chez l’un des plus gros éditeurs français, Michel Lafon, faiseur émérite de best-sellers depuis plusieurs décennies. La couverture de Et avec votre esprit, tout comme le frisson du plaisir de lecture, rappelle le meilleur de Maxime Chattam ou Michel Bussi. Nous sommes allés le rencontrer non loin du Club Montmartre afin de comprendre les étapes de cette mue si réussie.
Comment un pro du poker business se décide-t-il un jour à se lancer dans la littérature ?
J’étais à un moment de flottement dans ma trajectoire professionnelle, après mon départ de PokerStars, et je ne savais pas encore si je voulais continuer dans cette direction. Comme j’avais un peu de temps devant moi, je me suis assis devant mon ordinateur, avec pour idée un peu folle d’écrire… un roman !
D’où vous vient la passion de l’écriture ?
En fait, je fais partie de la génération des premiers rôlistes, qui ont découvert les jeux de rôle à leur adolescence à la fin des années 1980. On est parfois « maître du jeu », et dans ce cas il faut savoir poser un décor, inventer des personnages et déployer une histoire en quelques secondes. Cela m’a toujours fasciné, et j’ai baigné dans cet univers plusieurs années, c’était une vraie passion, et on avait beau décrier cette activité dans les médias, elle faisait énormément marcher l’imagination… Alors j’aurais pu écrire un roman de fantasy, mais sur le coup, je me suis senti plus à l’aise avec un matériau policier, un vrai thriller…
Comment avez-vous procédé et quelles étaient vos intentions de départ ?
J’ai voulu écrire un livre pour les gens qui n’aiment pas lire. Un page-turner où l’on retient son souffle et où l’on n’a surtout pas envie de s’arrêter. Je ne prétends pas faire de la grande littérature « blanche », comme on dit, mais un vrai bon thriller, avec des ficelles pas trop grosses, qui sait étonner et évite les clichés… Il y a des maîtres du genre en France, comme Jean-Christophe Grangé ou Maxime Chattam, par exemple, et je voulais donner autant de plaisir à mes futurs lecteurs… s’il y en a [rires] !
Vous vous êtes lancé tête la première sans plan aucun ?
Non, et j’ai écrit tout d’une traite en assez peu de temps en fait. Mais à la relecture, ça a été une tout autre paire de manches [rires] ! Je me suis rendu compte qu’il y avait des répétitions de scènes, des personnages que je perdais en route, etc. Alors j’ai tout repris, tout boulonné, et j’ai pas mal « dégraissé » le texte, afin d’être plus efficace, plus direct. Ensuite je l’ai fait relire à quelques amis et ma femme, en qui j’avais absolument confiance.
Et au moment de sauter le pas et d’aller voir un éditeur ?
Je ne connaissais vraiment personne dans l’édition, et j’ai donc « sonné » à la porte de Michel Lafon, qui est un énorme éditeur. J’ai été étonné, après un court entretien avec une éditrice, qu’on accepte de me lire. Elle m’a rappelé très vite, et c’était parti ! Je ne sais pas si j’ai eu énormément de chance, mais pour moi tout est allé très vite…
Vous insérez un peu de poker dans votre roman, mais ce n’est pas le cadre principal…
Le poker, dans le cinéma ou la littérature, ça peut parfois être un écueil lorsqu’il est trop présent. J’aimais l’idée que mon héros sache calculer les statistiques, par exemple, comme un pro du poker, mais qu’il soit faillible, car dès lors que l’on entre dans le domaine de l’humain et de sa psychologie, on n’est plus dans un monde fermé où tout se calcule…
Vous avez également fait le choix de prendre des personnages féminins loin de tous les clichés…
J’espère en tout cas [rires] ! Lorsque j’écris, c’est très cinématique, je pense instantanément à une forme, une silhouette, un visage, et même si je ne décris que très peu mes personnages, pour moi ils vivent à l’intérieur de mon cerveau. C’est important d’avoir des personnages féminins forts qui ne tombent pas dans les clichés des mauvais feuilletons policiers !
Comment avez-vous travaillé en termes de fact checking ?
J’ai fait marcher ma « communauté » internet en demandant l’aide auprès de professionnels de la police, et en effectuant bien sûr pas mal de recherches. C’est central d’avoir des effets de réel lorsqu’on écrit, afin qu’on n’ait pas de réticence à entrer dans la réalité du récit. J’espère que tous les lecteurs prendront autant de plaisir à lire ce livre que j’en ai pris à l’écrire…
L’histoire
Appelée d’urgence à l’Institut des sciences de Strasbourg à la suite de la découverte du cadavre atrocement mutilé du prix Nobel de chimie, la commissaire Pourson se retrouve confrontée à une scène de crime aussi sanglante qu’énigmatique… Au même moment, dans la région lyonnaise, le lieutenant Vairne, connu pour ses méthodes peu orthodoxes et son obsession des probabilités mathématiques, doit enquêter sur la disparition d’un éminent physicien. Mais chaque nouvel indice épaissit le mystère autour de cette affaire et le convainc peu à peu d’une conspiration sans précédent. Quelle probabilité pour que ces deux affaires soient liées ? Une certitude, Pourson et Vairne vont devoir s’allier pour le découvrir.
EXTRAIT
Et avec votre esprit, par Alexis Laipsker (éd. Michel Lafon ; sortie 27 février 2020)
– 1 –
Curieusement, ce fut moins la douleur que l’étonnement qui frappa le professeur Toussant lorsqu’il reçut le premier coup. Terrassé par cet objet métallique qui avait ouvert ses chairs et fracassé son crâne, il s’effondra sur le carrelage froid du laboratoire de la faculté de chimie. Comme un dernier sarcasme du destin, alors qu’il ne lui restait que quelques instants à vivre, sa chute lui sembla durer une éternité.
« Un peu de science éloigne de Dieu, mais beaucoup y ramène ! »
Georges Toussant n’entendit pas les paroles de son agresseur. Hagard, il se redressa péniblement mais ne parvint qu’à se mettre à genoux. Le scientifique porta la main à sa tête. Il sentit une plaie béante de laquelle s’écoulait du sang qui s’insinuait entre ses doigts, maculant d’abord la manche de sa blouse avant de se répandre en gouttes écarlates sur le carrelage beige.
Lorsqu’il releva la tête, le sang dessinait déjà un masque sordide. Il écarquilla les yeux, puis tendit la main vers son assaillant pour l’implorer de l’épargner. Il lut dans le regard gris du bourreau une détermination farouche, la froide volonté de s’acquitter de sa mission. Il n’y aurait pas de miséricorde. Sur le visage du professeur Toussant, la stupéfaction fit alors place à la frayeur.
Balbutiant quelques mots incompréhensibles, il tenta péniblement de se relever en s’appuyant sur la paillasse, avant de recevoir un deuxième coup au front qui interrompit son mouvement. Il s’écroula une nouvelle fois, emportant dans sa chute un râtelier d’éprouvettes qui se brisèrent avec fracas, projetant de petits éclats de verre tout autour de lui. Au sol, des liquides multicolores se mêlaient au sang.
Les gestes du professeur n’étaient plus que les réflexes désordonnés d’un corps privé de contrôle, une dernière manifestation de la vie, dépourvue de logique et de sens, tentant désespérément de s’agripper à quelque chose pour ne pas sombrer dans le néant. Ses yeux s’agitaient dans leur orbite, cherchant vainement une échappatoire, n’en trouvant aucune. Il voulut crier, non pour appeler à l’aide puisque les lieux avaient été désertés plusieurs heures auparavant, mais parce que la peur de mourir était trop insoutenable pour demeurer intérieure. Le cri ne vint jamais.
L’ombre enjamba le professeur, sa main gantée se resserrant sur l’objet qu’elle tenait, puis elle se pencha et lui infligea un nouveau coup à la tête. L’os craqua avec un bruit de bois sec.
Décidément peu clémente, la Mort refusa encore de l’emporter et, au lieu de s’achever à cet instant, le supplice du professeur Toussant ne faisait en réalité que commencer.
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Portraits / Interviews
Rencontre exclusive : Barny Boatman, vainqueur de l’EPT Paris
Published
9 mois agoon
7 mars 2024Barny Boatman, « One for the good guys »
Il est des figures du poker dont on apprécie la seule existence. Des personnalités qu’on aime suivre sur les réseaux sociaux pour leur intelligence, leur modestie, leur humour et leur humanité. Et quand on les retrouve en table finale d’un tournoi majeur du circuit international, on peut passer sa nuit à le soutenir, anonymement, sur les streaming des compétitions. En finissant vainqueur du fabuleux EPT Paris, organisé conjointement par les casinos Barrière et PokerStars, Barny Boatman a fait plaisir à tous les vrais amoureux du poker. Quelques jours après son succès incontestable en terres parisiennes, le champion anglais nous a accordé un entretien exclusif.
Vous venez de remporter l’une des compétitions les plus relevées de la saison poker, l’EPT Paris. A quel moment pensiez-vous que ce titre était pour vous ?
Je pense que la plupart des joueurs de poker sont plein d’optimisme lorsqu’ils s’inscrivent à un tournoi, autrement ça ne vaut pas le coup de s’acquitter du buy-in ! (rires) En tout cas , c’est mon cas… Ce n’est cependant qu’à mi-journée du Day 2 où j’ai compris que j’arriverais sans doute à la bulle du tournoi avec un joli tapis devant moi, même si j’ai attendu le Day 4, à son début, pour visualiser plus clairement ma place en table finale. A la fin de cette journée-là, j’étais même persuadé que la gagne était envisageable.
Quels ont été les moments pivots de votre tournoi ?
Il y en a eu quelques-uns… J’ai eu plusieurs mains où je suis tombé sur le flop avec une overpaire, et où j’ai réussi à faire coucher la main de mes adversaires en représentant quelque chose de plus fort qu’en réalité. Dans au moins l’une de ces situations, je n’aurais même jamais tenté cela si j’avais su ce que l’autre joueur avait en face ! Il y a eu deux grosses mains qui m’ont assuré le tournoi. La première, à la fin du Day 4, où je paye un bluff avec une main faible dans un très gros pot qui me donne le chiplead, et une autre en finale, où je pousse Kauffman à se lancer dans un énorme bluff alors que j’avais un full contre ses deux paires. Nous n’étions plus que trois, et j’ai été à nouveau propulsé en tête. Ensuite, je n’ai jamais regardé derrière moi ! (rires)
Comment avez-vous fêté cette victoire ?
Tout cet argent va changer la vie de ma compagne et moi-même. Cela tombait bien, on cherchait une maison avec l’eau courante, cela devrait être possible désormais… On a fêté ça avec un très bon repas au Fouquet’s, sur les Champs-Elysées, et ensuite je trouverai bien l’occasion de fêter avec des amis cette belle victoire à Londres, Dublin et même Madrid. Je voudrais partager cette joie avec autant d’amis que possible. Et maintenant que j’ai goûté à la victoire sur l’EPT, je devrais sûrement avoir encore plus envie de remettre ça…
Comment avez-vous débuté le poker, en Grande-Bretagne ?
A l’école, tout simplement. Et ensuite, le circuit classique des parties privées, puis des casinos, mais aussi des cercles de jeux et des cash-games plus élevés avec des hommes d’affaires. J’ai joué dans à peu près tous les endroits possibles au monde : des pubs qui sentaient la bière chaude, des arrière-salles et des clubs luxueux. Où qu’il y ait de l’action, j’y vais, et je franchissais même la Manche souvent afin de voir mon ami Bruno Fitoussi à l’Aviation Club de France, à l’époque.
Quel est l’état de la scène poker britannique en 2024 ?
La culture du poker a toujours été très présente en Grande-Bretagne. De gros circuits sont toujours actifs, comme l’UKIPT qui va débuter à Dublin très prochainement. C’est surtout la scène tournois qui fonctionne très bien, ce qui permet à de jeunes talents de se révéler et de faire de belles performances à l’international.
Vous faites partie du quatuor qui a créé le fameux site de classement HendonMob, qui a changé le monde du poker…
Au début des années 1990, mon frère Ross —qui est un acteur assez connu en Grande-Bretagne— et moi-même avions une partie privée vers le quartier d’Archway, tandis que Joe Beevers et Ram Vaswani en avaient une autre, bien plus chère et sérieuse, dans un autre quartier du nom de Hendon. On est allés jouer là-bas, et uqelques mois plus tard, on s’est retrouvés à faire le tour du monde ensemble. On nous a surnommés à l’époque « The Hendon Mob » (la bande de Hendon, ndlr) même si je suis persuadé encore aujourd’hui que « The Archway Mob » aurait mieux sonné ! (rires)
Pourquoi aviez-vous choisi le poker comme mode de vie ?
C’est la liberté, tout simplement. Seul le poker pouvait m’offrir cela : les voyages, les amis, les défis incessants. Cela vous pousse à toujours réfléchir et apprendre, sans cesse.
Le poker est un jeu d’argent —comment vous en accommodez-vous à un niveau personnel et politique, vous qui êtes très engagé dans le social ?
Il existe bien des façons de gagner sa vie, certains sont plus productives et socialement enrichissantes que d’autres. Je n’ai jamais passé ma vie à simplement jouer au poker. J’essaie toujours d’être impliqué dans des projets plus créatifs, comme l’écriture, mais surtout d’utiliser mon temps et mes ressources financières pour soutenir et aider les personnes et les causes qui me tiennent à cœur. A certains moments de ma vie, lorsque mon indépendance financière et ma disponibilité étaient au mieux, j’ai ainsi pu vraiment être là auprès de mes amis et ma famille.
Comment avez-vous su vous adapter au fil de toutes ces années ?
Vu que je viens de devenir le plus vieux des champions EPT, je suppose que je n’ai pas tout perdu ! (rires) Ce jeu, c’est un jueu d’adaptation, autant face à des joueurs individuels à votre table, mais aussi aux changements de dynamiques d’un jeu ou d’un tournoi, mais aussi aux évolutions des concepts, des styles de jeu et des stratégies qui régissent le poker. Le plus important, je pense, c’est de relever le défi en y prenant du plaisir, de toujours apprendre, et surtout d’improviser selon les circonstances. Je n’étudie pas à proprement parler le jeu, même si je devrais sûrement, et je ne me considère absolument pas comme un des top joueurs de mon époque, mais à certains moments, mon expérience me permet de m’en sortir assez pour que je n’aie pas envie de me mettre à étudier formellement le poker. On me parle souvent du « bon vieux temps du poker », comme si c’était il y a des siècles, mais franchement, gagner un des plus beaux tournois de la saison, dans une des plus belles villes du monde, en magnifique compagnie, ce ne serait pas ÇA les bons vieux jours ? (rires)
Online
Dans La Tête d’un Pro revient en force sur Winamax !
Published
12 mois agoon
11 décembre 2023Après la douloureuse élimination d’Alexane Najchaus sur le Freezeout à 3 000 $ lors des WSOP, la série mythique Dans La Tête d’un Pro de Winamax tourne sa caméra vers Mustapha Kanit. Dans cette série de 7 épisodes, le numéro 1 italien prend le relais pour remettre d’équerre cette nouvelle saison, sur l’un des tournois emblématiques des WSOP !
Après 13 ans d’existence, la série Dans la Tête d’un Pro reste fidèle à ses débuts avec un concept fort : transporter les passionnés et la communauté poker dans la peau d’un membre du Team Winamax sur les tournois les plus prestigieux et les plus difficiles de la planète poker.
Le thème WSOP de cette année pour le Team Winamax : surpasser les 3 millésimes précédents, durant lesquels pas moins de 6 bracelets au total ont été remportés.
Le jovial de l’équipe se lance sur l’emblématique 6-Max
Mustapha Kanit, élu clown officiel du Team Winamax est aussi redoutable cartes en mains qu’hilarant durant les pauses-dîner. Lors de cette série d’épisodes, les spectateurs pourront suivre le numéro 1 italien sur l’un des tournois les plus emblématiques de l’ère moderne des WSOP, le 6-max à 5 000 $ l’entrée, où plus de 1 000 joueurs sont attendus.
En quelques années, la marque Texapoker, fondée parApo(stolos) Chantzis, est devenue un incontournable du poker hexagonal, jusqu’à devenir quasiment hégémonique depuis la reprise d’activité après la pandémie Covid. Entouré de François Lascourrèges, fidèle depuis des années, et Mickaël Lesage, nouvel arrivant dans la galaxie Texapoker, Apo crée, dirige et assure désormais plus de 1600 tournois par an. Rencontre du triumvirat qui fait battre le cœur du poker français.
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