Portraits / Interviews
Interview Poker52/Ilan Boujenah : "Je ne partirai pas avant d'avoir une armoire remplie de trophées"
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11 ans agoon
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BorisIlan Boujenah a signé il y a quelques jours l’une des plus belles performances de sa carrière en remportant le WPT National Gruissan face à Paul-François Tedeschi. Un succès attendu qui lui donne un surcroît de motivation pour la suite. Le jeune homme a faim de victoire et veut le faire savoir à tout le monde.
Poker52 est parti à sa rencontre afin d’en savoir plus. Rencontre avec un joueur qui n’a pas sa langue dans sa poche.
Poker52 : Quelles sont tes premières impressions après cette victoire ?
Ilan Boujenah : Je suis rassuré. Ca faisait presque un an que je n’atteignais plus les places payées en live et que je n’arrivais pas à faire la différence sur les fins de tournois online. Et toujours avec l’impression de me faire « voler ». Les symptômes sont classiques. On se pose des questions sur son jeu et on doute. Mais le plus drôle, ce sont les gens qui vous font douter en vous demandant de raconter des coups tout en étant à la recherche d’éventuelles erreurs (très souvent avec un réel manque d’objectivité). Le but est de se rassurer en se disant : « Si je gagne, c’est que je joue bien et non que je good run ».
Donc cette victoire, de plus avec la manière selon moi, ça me rassure. Je me dis : « Ouf, le poker marche encore et j’ai le droit d’avoir parfois la main gagnante au showdown ».
Poker52 : Tu signes ta première victoire majeure sur le circuit. Une saveur particulière ?
Ilan Boujenah : Non, pas du tout. Certes le trophée est beau et c’est un WPT, mais c’est avant tout un tournoi à 1500 € avec moins de 200 joueurs et un niveau assez faible. La seule saveur particulière est que j’ai l’impression de remettre les choses à leur place (du moins dans la tête des gens « result oriented » ou simplets). Ne pas faire de résultats sur la trentaine de tournois que j’ai pu jouer cette année n’a rien d’anormal. Tout comme faire deux ou trois tables finales en un an n’a rien d’extraordinaire. J’ai eu l’impression que j’étais condamné à perdre toute l’année. Certains de mes amis (même ceux à qui j’ai appris à jouer et qui eux, de leur côté, gagnent) doutaient de moi. Cela m’a vraiment vexé. Les gens ont la mémoire courte et à ce jeu, le meilleur ne gagne pas toujours. Un seul coup suffit à t’éliminer. Le poker est bien plus cruel qu’on ne l’imagine.
Poker52 : Tu disais il y a peu que le poker avait moins d’importance dans ta vie. J’imagine que cette victoire te donne une motivation supplémentaire pour la suite ?
Ilan Boujenah : Je disais que j’étais moins passionné et tout cela ne va pas changer grand-chose. Par contre, j’ai soif de victoire comme jamais. Je suis passé assez proche de nombreuses belles performances online et live qui se sont jouées à une carte. Cette victoire va me remettre sur les rails. La confiance en soi est un atout essentiel pour gagner au poker. Mes plus belles années sont à venir et paradoxalement j’ai l’impression d’avoir franchi un palier en 2013 qui est pourtant ma plus mauvaise année. Je ne partirai pas avant d’avoir une armoire remplie de trophées.
Poker52 : Quel a été le moment décisif selon toi dans le tournoi ?
Ilan Boujenah : Il y en a eu plusieurs, mais le plus marquant d’entre eux est le début du Day 3 à 20 left lorsque je me suis retrouvé à gauche du chipleader (un fish americain). Il avait 750k au départ de la journée et moi 400.
Lorsque sur un raise UTG il a défendu T4o, j’ai compris que je tenais ma poule aux oeufs d’or. Une heure plus tard, il restait 16 joueurs et il était out. J’avais alors devant moi 1.5 million soit plus de trois fois la moyenne. Il a craqué avec une paire de valets sur K8286 pour un pot total de 100bb alors que l’action preflop était juste un raise et un call. Après une longue réflexion, j’ai finalement payé avec mon KT. J’avais dès lors les clefs du tournoi en main.
Poker52 : A quel moment as-tu senti que tu allais l’emporter ?
Ilan Boujenah : Précisément à ce moment-là. Avoir autant de jetons à l’approche de la table finale, c’était largement suffisant pour terrasser n’importe quel adversaire. Tedeschi, le seul vrai danger, est arrivé à notre table avec 800k en jetons. En moins de 20 minutes, il était retombé à 200k soit 8bb au départ de la finale.
Poker52 : Que peux-tu nous dire sur lui ?
Ilan Boujenah : C’est un garçon vraiment gentil et sympathique. Il a beaucoup de gnaque et joue bien. Il est complètement fearless. Il a encore une belle marge de progression. Néanmoins, je pense qu’il y a encore certains aspects de son jeu où il n’est pas au point techniquement.
Mais il est intelligent et il apprendra vite. Il a peu d’expérience en tournois et déjà de beaux résultats. Pour s’améliorer, il devra jouer encore beaucoup, partir de France et grinder le .com. Sans cela, son jeu sera capé et il ne pourra pas atteindre le plus haut niveau même avec le talent incontestable qu’il possède. Si tu veux être le meilleur, il faut les affronter et comprendre leur manière de réfléchir. Et les meilleurs jouent sur le .com.
Poker52 : Avais-tu changé ta préparation pour ce tournoi?
Ilan Boujenah : Pas du tout. Je n’avais pas dormi la veille du Day 1 en raison d’une 18ème place sale et tardive la veille lors des FCOOP. Puis j’ai manqué mon train par deux fois pour des raisons à dormir debout. J’ai finalement terminé assis par terre entre deux wagons à côté des toilettes car le train était plein. Je suis arrivé à Gruissan à 20 min de la fin des inscriptions du Day 1. Heureusement que Pierre Barthelemy a eu la gentillesse de venir me chercher à la gare. J’ai pu m’inscrire in extremis. Il aurait dû me laisser à la gare… hahaha…
Poker52 : As-tu l’intention d’étoffer ton programme poker du coup ?
Ilan Boujenah : J’avais l’intention de beaucoup jouer donc non. On reprend les mêmes et on recommence.
Poker52 : Quel regard portes-tu sur le poker en France ?
Ilan Boujenah : Il y avait un potentiel énorme avant que l’Etat ne parte en sucette par cupidité. Cela va leur couter cher vu que tous les joueurs se sont exilés. Le trafic sur les sites est sur le déclin alors que les joueurs sont parmi les plus gros consommateurs de la société. Je pense que la France a perdu de l’argent à long terme en augmentant le rake et en voulant VOLER les joueurs « pro » en les surtaxant rétroactivement (autant dire en les brokant). C’est quand même aberrant que certains joueurs emblématiques ou jeunes talents ne jouent plus le circruit parce qu’on leur a demande toujours plus d’argent. Un argent qu’ils n’ont jamais eu.
J’ai 1.3 millions d’euros de gains et je suis presque raide car les tournois contrairement au cash comportent un énorme aléa. Si les meilleurs joueurs ont un leger edge, ils peuvent perdre durant un laps de temps indéterminé. Sans oublier que seulement 5% des joueurs sont gagnants overall (je ne parle même pas des frais). Donc qui sont les pros ? Définissez le mot « pros ». Ce « métier » est bien plus dur que l’on pense et peu de gens y peuvent y survivre. Mentalement comme financièrement. C’est en partie à cause de cela que le poker français a été stoppé dans son élan alors qu’il y avait beaucoup de potentiel.
Poker52 : Peux-tu nous dire comment tu as découvert le poker ?
Ilan Boujenah : Entre amis tout bêtement.
Poker52 : Si tu devais changer quelque chose dans ta carrière de joueur, ce serait quoi ?
Ilan Boujenah : Sans hésiter, mon premier gros tournoi, le WPT a 10k en mai 2010. J’étais mauvais et inexpérimenté, mais j’avais quelque chose chose. A neuf left, après avoir déroulé pendant quatre jours, j’ai littéralement jeté 500 000 euros (une des seules fois où j’avais pourtant 100% de mon action) avec A9hh face à Theo Jorgensen qui a ensuite remporté le tournoi. Il était alors chipleader et moi deuxième avant ce spew monumental.
Poker52 : Quel est ton rêve en tant que joueur de poker ?
Ilan Boujenah : Le seul véritable rêve que j’avais en commençant était d’être respecté par ceux pour qui j’ai de l’estime. Le reste c’est pour faire joli. Un titre EPT m’excitera tout autant qu’un bracelet WSOP. Mon rêve est aujourd’hui exaucé. Les meilleurs joueurs du monde me connaissent et me respectent pour mon jeu et mon caractère, Certains sont même devenus des amis proches. Pour moi c’est une satisfaction personnelle énorme. Evidemment le but premier est l’argent et je n’en ai pas pour le moment (je suis stacké intégralement depuis 2013 et mon downswing à 250k avec mon propre argent), mais je sais que c’est une question de temps. Quand j’aurai gagné la somme que je me suis fixée, je ne jouerai que de temps en temps et je me lancerai dans certains business que j’ai déjà en tête. Je gagnerai de l’argent régulièrement et je ne dormirai pas en me demandant de quoi sera fait demain. J’espère que j’aurai à payer un maximum d’impôts.
Poker52 : Merci Ilan et bonne chance pour la suite.
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Portraits / Interviews
Rencontre exclusive : Barny Boatman, vainqueur de l’EPT Paris
Published
10 mois agoon
7 mars 2024Barny Boatman, « One for the good guys »
Il est des figures du poker dont on apprécie la seule existence. Des personnalités qu’on aime suivre sur les réseaux sociaux pour leur intelligence, leur modestie, leur humour et leur humanité. Et quand on les retrouve en table finale d’un tournoi majeur du circuit international, on peut passer sa nuit à le soutenir, anonymement, sur les streaming des compétitions. En finissant vainqueur du fabuleux EPT Paris, organisé conjointement par les casinos Barrière et PokerStars, Barny Boatman a fait plaisir à tous les vrais amoureux du poker. Quelques jours après son succès incontestable en terres parisiennes, le champion anglais nous a accordé un entretien exclusif.
Vous venez de remporter l’une des compétitions les plus relevées de la saison poker, l’EPT Paris. A quel moment pensiez-vous que ce titre était pour vous ?
Je pense que la plupart des joueurs de poker sont plein d’optimisme lorsqu’ils s’inscrivent à un tournoi, autrement ça ne vaut pas le coup de s’acquitter du buy-in ! (rires) En tout cas , c’est mon cas… Ce n’est cependant qu’à mi-journée du Day 2 où j’ai compris que j’arriverais sans doute à la bulle du tournoi avec un joli tapis devant moi, même si j’ai attendu le Day 4, à son début, pour visualiser plus clairement ma place en table finale. A la fin de cette journée-là, j’étais même persuadé que la gagne était envisageable.
Quels ont été les moments pivots de votre tournoi ?
Il y en a eu quelques-uns… J’ai eu plusieurs mains où je suis tombé sur le flop avec une overpaire, et où j’ai réussi à faire coucher la main de mes adversaires en représentant quelque chose de plus fort qu’en réalité. Dans au moins l’une de ces situations, je n’aurais même jamais tenté cela si j’avais su ce que l’autre joueur avait en face ! Il y a eu deux grosses mains qui m’ont assuré le tournoi. La première, à la fin du Day 4, où je paye un bluff avec une main faible dans un très gros pot qui me donne le chiplead, et une autre en finale, où je pousse Kauffman à se lancer dans un énorme bluff alors que j’avais un full contre ses deux paires. Nous n’étions plus que trois, et j’ai été à nouveau propulsé en tête. Ensuite, je n’ai jamais regardé derrière moi ! (rires)
Comment avez-vous fêté cette victoire ?
Tout cet argent va changer la vie de ma compagne et moi-même. Cela tombait bien, on cherchait une maison avec l’eau courante, cela devrait être possible désormais… On a fêté ça avec un très bon repas au Fouquet’s, sur les Champs-Elysées, et ensuite je trouverai bien l’occasion de fêter avec des amis cette belle victoire à Londres, Dublin et même Madrid. Je voudrais partager cette joie avec autant d’amis que possible. Et maintenant que j’ai goûté à la victoire sur l’EPT, je devrais sûrement avoir encore plus envie de remettre ça…
Comment avez-vous débuté le poker, en Grande-Bretagne ?
A l’école, tout simplement. Et ensuite, le circuit classique des parties privées, puis des casinos, mais aussi des cercles de jeux et des cash-games plus élevés avec des hommes d’affaires. J’ai joué dans à peu près tous les endroits possibles au monde : des pubs qui sentaient la bière chaude, des arrière-salles et des clubs luxueux. Où qu’il y ait de l’action, j’y vais, et je franchissais même la Manche souvent afin de voir mon ami Bruno Fitoussi à l’Aviation Club de France, à l’époque.
Quel est l’état de la scène poker britannique en 2024 ?
La culture du poker a toujours été très présente en Grande-Bretagne. De gros circuits sont toujours actifs, comme l’UKIPT qui va débuter à Dublin très prochainement. C’est surtout la scène tournois qui fonctionne très bien, ce qui permet à de jeunes talents de se révéler et de faire de belles performances à l’international.
Vous faites partie du quatuor qui a créé le fameux site de classement HendonMob, qui a changé le monde du poker…
Au début des années 1990, mon frère Ross —qui est un acteur assez connu en Grande-Bretagne— et moi-même avions une partie privée vers le quartier d’Archway, tandis que Joe Beevers et Ram Vaswani en avaient une autre, bien plus chère et sérieuse, dans un autre quartier du nom de Hendon. On est allés jouer là-bas, et uqelques mois plus tard, on s’est retrouvés à faire le tour du monde ensemble. On nous a surnommés à l’époque « The Hendon Mob » (la bande de Hendon, ndlr) même si je suis persuadé encore aujourd’hui que « The Archway Mob » aurait mieux sonné ! (rires)
Pourquoi aviez-vous choisi le poker comme mode de vie ?
C’est la liberté, tout simplement. Seul le poker pouvait m’offrir cela : les voyages, les amis, les défis incessants. Cela vous pousse à toujours réfléchir et apprendre, sans cesse.
Le poker est un jeu d’argent —comment vous en accommodez-vous à un niveau personnel et politique, vous qui êtes très engagé dans le social ?
Il existe bien des façons de gagner sa vie, certains sont plus productives et socialement enrichissantes que d’autres. Je n’ai jamais passé ma vie à simplement jouer au poker. J’essaie toujours d’être impliqué dans des projets plus créatifs, comme l’écriture, mais surtout d’utiliser mon temps et mes ressources financières pour soutenir et aider les personnes et les causes qui me tiennent à cœur. A certains moments de ma vie, lorsque mon indépendance financière et ma disponibilité étaient au mieux, j’ai ainsi pu vraiment être là auprès de mes amis et ma famille.
Comment avez-vous su vous adapter au fil de toutes ces années ?
Vu que je viens de devenir le plus vieux des champions EPT, je suppose que je n’ai pas tout perdu ! (rires) Ce jeu, c’est un jueu d’adaptation, autant face à des joueurs individuels à votre table, mais aussi aux changements de dynamiques d’un jeu ou d’un tournoi, mais aussi aux évolutions des concepts, des styles de jeu et des stratégies qui régissent le poker. Le plus important, je pense, c’est de relever le défi en y prenant du plaisir, de toujours apprendre, et surtout d’improviser selon les circonstances. Je n’étudie pas à proprement parler le jeu, même si je devrais sûrement, et je ne me considère absolument pas comme un des top joueurs de mon époque, mais à certains moments, mon expérience me permet de m’en sortir assez pour que je n’aie pas envie de me mettre à étudier formellement le poker. On me parle souvent du « bon vieux temps du poker », comme si c’était il y a des siècles, mais franchement, gagner un des plus beaux tournois de la saison, dans une des plus belles villes du monde, en magnifique compagnie, ce ne serait pas ÇA les bons vieux jours ? (rires)
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